Communication : Analyse sémiotique du processus de consommation (systèmes de valeurs individuelles ou holistiques) émanant de l’immixtion entre l’approche consommateur et l’approche marketing dans un contexte socioculturel mutant



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Communication :

Analyse sémiotique du processus de consommation (systèmes de valeurs individuelles ou holistiques) émanant de l’immixtion entre l’approche consommateur et l’approche marketing dans un contexte socioculturel mutant

(Cas de l’acquisition d’une voiture personnelle)

Elaborée par : Karima Amirat

Doctorante à la FSEGT

Mail : k.amirat@hotmail.fr

Adresse : ap G bloc G résidence Ibn Charaf nasser 2 Tunis 2037

Tél : 00216 24 916 996



Résumé : l’acquisition d’une voiture est un acte de consommation sous contrainte. Il est soumis à un processus de co-construction identitaire s’inscrivant dans un contexte socio-économique en perpétuelle mutation. L’analyse sémiotique de 28 entretiens réalisés auprès des cadres tunisiens âgés entre 30 et 35 ans à propos de la marque de leurs voitures personnelles nous révèlera les valeurs de consommation, les signes sous-jacents aux différentes marques, le processus de construction identitaire qui s y associe et les implications que peuvent y surgir sur le consommateur et le marketeur contemporain.

Mots clés : voiture, identité, sémiotique, consommateur, valeurs, marketing

De nos jours, la stratégie marketing ne mise plus sur l’invention d’un ou de plusieurs avantages pour le produit mais elle puise sa force essentiellement du comment les faire valoir. Cette mise en valeur est soumise, certes, à des codes et des normes préétablis qui facilitent d’une façon ou d’une autre la perception et la compréhension des messages par le consommateur ordinaire. Mais, pour pouvoir rester dans cet univers de création et d’anticipation, le marketing doit toujours chercher à transgresser, innover, et même créer des codes personnalisés pour chaque marque. Ceci, suscitera l’attention, l’implication et même l’incarnation des valeurs émises du consommateur transformé en un consom-acteur car c’est lui, désormais, qui agit sur le message et non pas l’inverse.


Sur un autre volet, il est évident que la notion de la marque en marketing est soumise à un système de registres. Ces registres sont en perpétuelle mutation selon les cadres spatio-temporels qui les émergent. Sur ce, la recherche marketing doit savoir s’adapter, et même booster, aux nouveaux horizons qui dépassent le seuil de maturité communicationnelle qu’a atteint la société contemporaine. La création n’est plus figée au niveau de l’invention mais elle subit à l’impulsion de l’innovation et même de la prémonition de ses propres crédos et des valeurs qu’ils véhiculent.
Méthode de l’analyse sémiotique :
Suite aux entretiens semi-directifs qu’on a effectué auprès d’un échantillon de 28 cadres tunisiens âgés entre 30 et 35 ans travaillant dans la zone de grand Tunis et suivant le guide d’entretien cité dans l’annexe, nous avons pu collecter une avalanche de données assez importante. Ces données auraient pu être analysées en suivant la méthodologie classique d’analyse données allant de l’analyse thématique dans la phase exploratoire jusqu’à la purification et la validation des échelles de mesure et d’un modèle de recherche. Ça ne sera pas l’itinéraire suivi dans notre cas. En fait, comme nous l’avons mentionné dès le début, il s’agit ici d’une analyse sémiotique qui considérera les propos tenus de nos 28 répondants comme des récits personnels, subjectifs et hétérogènes. Ceci dit, pour parvenir à une analyse plus au moins exhaustive permettant d’élaborer un modèle conceptuel sémiotiquement correcte, nous allons, dans un premier lieu, fixer quatre axes d’interprétation décelés des études antérieures portant sur le thème de la contextualisation des valeurs de consommation.

Le premier axe porte sur les études de Ricoeur (1990) qui stipule que le récit de la vie d’un être humain émane de sa propre construction. Cette construction est le fruit d’une interprétation personnelle de sa position par rapport aux circonstances qui l’entourent. Néanmoins il a précisé l’importance de l’existence d’un modèle narratif vu le caractère évasif qui dépeint notre existence. Sur ce, les propos de chacun de nos répondants doivent être analysés en tant que récits singuliers de plusieurs identités narratives. Lors des entretiens on a détecté que ce récit suit un certain ordre chronologique présentant des évènements passés, des rapports présents et des ambitions futures. En fait, en répondant à notre question « depuis quand tu possède ta propre voiture ? » beaucoup de nos interviewés nous ont raconté plutôt leurs vieux souvenirs et anecdotes sur leurs premières expériences de conduire «  je conduisais même sans permis » (Khaled), « je piquais souvent la voiture de mon père quand j’étais au lycée pour frimer devant les filles » (Zied). Cette déformation de la question ne nous a pas gênés car on savait que le sens désiré par notre question a été transmis. En fait, posséder sa propre voiture est synonyme de l’atteinte d’une certaine indépendance et maturité personnelle ou professionnelle. Nos répondants ont transgressé cela au fait de savoir conduire qui est un acte qui précède de quelques années l’acquisition de sa propre voiture pour nous montrer qu’ils ont atteint cette indépendance depuis longtemps. Le récit au présent on l’a détecté dans les réponses aux questions comme « qu’évoque le mot voiture pour toi ? ». Des réponses comme « ma voiture c’est ma deuxième femme » (Akram), « c’est un cadeau de mon père » (Noura), «  c’est mon joujou je la chouchoute tous les jours » (Imen) nous ont révélé les rapports qu’entretiennent nos répondants avec leurs voitures dont l’acquisition n’est en aucun cas un acte anodin. Plus qu’un investissement financier, une voiture est aussi un investissement affectif et moral. « J’aurai une grande voiture familiale » (Afef), « j’acheterai la dernière ferrari sur le marché » (Nacer), « je garderai la mienne, je suis bien avec » (Noura) toutes ces réponses nous ont révélé les singularités dans les ambitions futures de nos répondants. Cette singularité se manifeste dans ce qu’a appelé Bajoit (2001) la tension entre deux projets de vie (réussir socialement par le vouloir paraitre ou réussir à donner un sens à sa vie indépendamment du regard de l’autre par le vouloir être), ainsi changer sa voiture est un évènement futur marquant chez nos répondants, il est soumis à cette tension à part le concours des contraintes budgétaires.

Quant au deuxième axe on le saisit dans les travaux de Landowski (1997) pour qui la construction d’une identité singulière ne peut être faite que suite à ce qu’il appelle l’altérité. Ceci veut dire que ce n’est qu’en se comparant aux autres qu’un individu parvient à cerner les traits de sa propre histoire. Cette approche est d’un apport important pour notre sujet car on est en fait dans une quête d’une analyse socio-sémiotique c'est-à-dire qui prend en considération l’interaction sociale qui régit le comportement et le système de valeurs de chaque répondant interviewé. En effet des réponses comme « ma voiture était une ancienne Golf décapotable quand j’étais étudiant, maintenant j’ai opté pour une voiture populaire familiale » (Ramzi), « j’en ai assez de ma Yaris de Monsieur tout le monde… je veux une voiture plus élégante et attirante à mon image quoi ! » (Asma), «  ce n’est pas parce que je n’ai pas les moyens, mais je ne cherche pas à posséder une grosse berline, j’aime les voitures utilitaires et pratiques surtout celles dont les pièces sont disponibles sur le marché tunisien, je ne juge pas les gens qui ont des belles voitures …d’ailleurs dans le quartier ou j’habite la majorité de mes voisins ont des belles voitures » (Walid), « la majorité de mes copines m’envient pour ma Mini Cooper et ça me fait plaisir, elle est tellement coquette et distinguée d’ailleurs je pense que mes collègues ne draguent que moi au boulot grâce à elle » (Ines) ; ces réponses mettent en exergue quatre stratégies de s’identifier par rapport à l’autre à travers l’acquisition d’une voiture : la première est celle d’affiliation (Boudieu 1979) émanant du fait qu’une voiture doit toujours refléter la situation civile, sociale et professionnelle de son propriétaire. La deuxième est celle de démarcation stipulant qu’une voiture est un moyen moderne pour faciliter le déplacement au gens actifs et qui réussissent dans leurs vies. La troisième est celle d’alignement, l’utilité d’une voiture réside dans son atout pratique, c’est un simple moyen de transport dont le choix ne doit pas être soumis aux contraintes socioculturelles. Enfin, la quatrième qui est celle de singularité (Brewer1991), posséder une voiture c’est un moyen pour se distinguer par rapport à son entourage, et plus la voiture est chère et inaccessible plus cette distinction est réussie et ce hormis le sens négatif ou positif de cette distinction.

Certeau (1980) a mis le doigt sur un autre volet de cette quête de singularité chez l’être humain. En fait, on ne peut se distinguer et créer sa propre histoire et sa propre identité que par le détournement quotidien des mœurs et valeurs stéréotypés imposés par les contraintes socioculturelles. Détourner comprend le fait de subir mais aussi d’utiliser sa ruse pour parvenir à s’approprier une vision personnelle et un comportement atypique face aux messages reçus et aux contraintes imposées sans pour autant choquer son entourage ou heurter le système de valeurs social. Et c’est la notre troisième axe d’analyse. Ce détournement intelligent est désigné par Levi’s Strauss (1962) par la métaphore du bricolage dans laquelle un consommateur est en fait un bricoleur qui établit une sorte de dialogue avec les éléments socioculturels précontraints puis il procède à un assemblage façonné selon sa propre vision vers une construction identitaire intersubjective. C’est tout simplement une quête de différentiation sur un fond de ressemblances. « moi et tous mes collègues au travail, à part le patron, on a la même voiture, une Clio, mais la mienne est de loin comme les autres c’est parce que je suis fan du tuning ….pratiquement tous les mois je lui rajoute les dernières créations dans ce domaine » (Ali), «  j’utilise ma Peugeot 206 les jours de la semaine pour aller au travail, ramener les enfants, faire les courses … mais pour le week end j’ai ma 4X4 Jeep c’est ma coqueluche je l’utilise pour aller faire les randonnées entre amis ou pour aller surveiller la ferme de mes parents, je sais que ce luxe n’est pas donné à tout le monde, même à moi, j’ai du faire beaucoup de concessions pour l’avoir, en fait je pense que c’était plutôt une obligation qu’un choix » (Taieb), « ma voiture est une Megane, on a toutes un petit faible pour cette voiture dans ma famille(rire) mais la mienne je l’entretiens quotidiennement, j’ai horreur des voitures sales, c’est un vrai calvaire tu sais, surtout avec les enfants » (Zayneb). Toutes ces réponses nous révèlent qu’il n’existe pas vraiment de dissimilitudes profondes entre nos répondants surtout sur le plan social et économique mais il existe des démarcations bricolées qui permettent à chacun d’entre eux de se positionner par rapport aux autres.

Le quatrième axe est une combinaison entre les travaux de Barthès (1957) et des travaux de Douglas et Isherwood (1979). En effet le premier a évoqué et critiqué, pour parvenir à interpréter l’ensemble des significations qui émanent d’un tel type de comportement ou d’un autre, ce qu’il appelle la notion de mythe c'est-à-dire des exemples représentatifs typiques provenant d’une classification socioculturelle archaïque et figée des comportements humains. Dans un autre volet, Douglas et Isherwood ont considéré que chaque individu est en fait son propre mythe. Par ses actes de consommation et les valeurs qui les régissent, chaque consommateur construit son propre univers et ses propres significations dont il est l’unique ambassadeur. Le choix d’une marque de voiture n’est pas seulement soumis au fait de combler le besoin d’appartenir à u groupe déterminé ; c’est aussi un acte révélateur d’une panoplie d’informations intersubjectives sur ses gouts, sa famille, sa carrière, sa localité … 

« toutes les familles possèdent une voiture populaire, c’est indispensable de nos jours » (Noura), « c’est normal qu’on cherche tous à avoir la dernière voiture mise sur le marché, après c’est une question de moyens financiers », « le chef service de ma banque me harcèle sans cesse, il veut me convaincre de déposer une demande de prêt pour l’achat d’une nouvelle voiture, le malin … je ne sais pas pourquoi il ne parvient pas à comprendre à quel point j’aime ma voiture actuelle, elle m’a accompagné dans toutes les étapes de ma vie, je ne suis pas encore prête pour la changer » (Hanen), « le jour de mon mariage j’ai insisté à utiliser ma propre voiture pour le cortège de la mariée, et ce, malgré les critiques de mes proches et de la famille de ma femme, en fait, cette voiture était le lieu de notre premier baiser et nous avons voulu qu’elle assiste à la fin heureuse qu’a connu notre histoire d’amour » (Wassim). Toutes ces réponses témoignent de l’omniprésence de la naïveté dans la consommation des mythes par nos répondants. Elle y est même dans leurs réticences à travers une supposée démythification. Tous vacillent entre le fait de reconnaitre ou d’ignorer les facteurs socioculturels et ou économiques qui ont intervenu dans l’acte d’acquisition d’une voiture personnelle. Néanmoins, tous nos répondants ont dénudé d’une façon spontanée la panoplie des significations rattachée à leurs voitures. L’approbation ou la désapprobation de leurs entourages n’ont jamais été une contrainte forte pour manifester un certain attachement sentimental sémiotiquement très éloquent à leurs voitures. La valeur d’une voiture n’émane pas seulement de sa valeur sociale et ou budgétaire, mais surtout de l’ensemble des significations subjectives qu’elle véhicule à travers les souvenirs et les expériences personnelles vécue en sa présence.

La projection des réponses émises par nos répondants nous a permis d’élaborer un modèle sémiotique de la production de l’identité à travers l’acquisition d’une nouvelle voiture qui se présente comme suit :


Projet de vie

Valeurs et idéaux de l’entourage familial et professionnel







Systèmes discursifs : les tendances, le contexte économique



Apprentissage social : acquis, héritage et expériences personnelles

Discours et pratiques





Plans de vie : situation familiale, hobbies …


Modèle général de construction de l’identité des cadres tunisiensà travers l’acte de l’acquisition d’une voiture personnelle

Le mapping sémiotique des valeurs de la consommation dans l’acquisition d’une voiture personnelle :

Dans ce volet de l’analyse, on va se focaliser sur les travaux de Floch (1990). Il est parti d’une étude utilisant le carré sémiotique comme outil d’analyse du processus de la consommation dans les hypermarchés, il a pu identifier quatre types d’attitudes chez les consommateurs : le convivial, le consomériste, le corvéable et le chineur.

Sur le plan sémiotique cette analyse a permis de déceler que les comportements, les attitudes et les attentes révélés à travers les récits des répondants, malgré leurs dissemblances, peuvent être classées selon des axes de valorisation limités. Floch (1990) les a délimité en projetant l’opposition entre les valeurs d’usage et les valeurs de base sur le carré sémiotique ce qui lui a permis de distinguer quatre positionnements virtuels de signification qu’il a désigné par les quatre axes de valorisation :


  • L’axe de la valorisation pratique : désigne la typologie virtuelle des consommateurs qui s’intéressent aux valeurs d’usage tels que ses fonctionnalités, sa solidité, son utilité ...

  • L’axe de la valorisation critique : désigne la typologie virtuelle des consommateurs qui évaluent constamment le produit en le soumettant à une comparaison et un jugement selon des critères externes.

  • L’axe de la valorisation ludique : désigne la typologie virtuelle des consommateurs qui établissent une relation fusionnelle avec le produit avec un désintérêt total vis-à-vis de ses atouts matérialistes et palpables.

  • L’axe de la valorisation utopique : désigne la typologie virtuelle des consommateurs qui sont en quête de l’au-delà à travers le coté abstrait ou matériel du produit.

En appliquant les différentes interprétations émises via les réponses de nos interviewés à ces quatre axes de valorisation sémantique, le mapping sémiotique (ou le carré sémiotique de Floch) des valeurs de consommation relatives à l’acquisition d’une voiture personnelle serait comme suit :

Utopique





  • Aspect pratique - la solidité

  • Formes souples et adaptables - beauté universelle

  • Respect de l’environnement - ténacité

  • Options utilitaires - actualisation avec les NT

  • dynamisme - épanouissement social

Critique Ludique

  • résistance aux chocs - puissance inégalée

  • Le modèle - formes attractives

  • Durée de vie du moteur - longitivité

  • Options de base - options à la pointe

  • image standard - symboles (virilité, féminité)

Pratique

Ce mapping sémiotique m’a permis de proposer cinq concepts permettant de décrire les valeurs de signification associées à l’acquisition d’une voiture personnelle :



  • La robustesse

  • L’esthétisme

  • L’endurance

  • La technologie

  • L’image sociale

La projection de ces cinq concepts sur les différents axes de valorisation nous permettra de déceler la panoplie des valeurs de la consommation et par conséquent les différentes motivations (hédonistes, oblatives, d’image sociale) qui catalysent le processus d’acquisition d’une voiture personnelle.

  • Le positionnement de sens utopique/critique : une voiture personnelle est la solution idéale pour faciliter la mobilité des cadres fonctionnaires surtout dans les zones urbaines, pour ça elle doit être pratique et malléable et pourquoi pas de petite taille pour faciliter le déplacement et le stationnement. D’un point de vue esthétique, les formes de la carcasse externe de la voiture doivent être non encombrantes pour faciliter le déplacement surtout dans les heures de pointe. Du coté endurance, la voiture personnelle doit être facile à entretenir ce qui rallongera sa durée de vie et en même temps assurera le respect de l’environnement. Une voiture personnelle d’un jeune cadre actif ne doit contenir que les options les plus utilitaires et basiques pour éviter le gaspillage en terme d’énergie et de concentration (un poste radio, un climatiseur et une fermeture centrale font l’affaire, pas besoin d’être à la pointe de la technologie), ceci en qui concerne l’axe de la technologie. Et enfin, en ce qui concerne l’image sociale, tous ces atouts qu’on vient d’attribuer à la voiture personnelle feront d’elle l’incontournable produit de consommation capable de refléter une image sociale contemporaine fortement recherchée de nos jours (être dynamique, à l aise dans son travail et avec son entourage, persévérant, engagé, sérieux …).



  •  Le positionnement de sens utopique/ludique : sous l’axe de la robustesse, une voiture personnelle doit être solide pour pouvoir résister face à un usage quotidien généralement dans des zones urbaines très actives ou les embouteillages et les accrochages sont fréquents. En ce qui concerne l’esthétique, les modèles et les designs des voitures personnelles destinées aux jeunes cadres sont reconnus mondialement et appréciés en tant que voitures populaires modernes. L’axe endurance est manifesté par le nombre de visites chez le mécanicien, chez les jeunes cadres l’investissement dans l’achat d’une voiture personnelle n’est pas un acte anodin dans leurs projets de vie, ainsi plus cette voiture est tenace et résistante plus cet investissement demeure rentable. Entre le ludique et l’utopique, l’axe de la technologie dans ce quadrant stipule qu’une voiture personnelle doit être magnée d’équipements à la pointe des nouvelles technologies, en effet la technologie ne fera que perfectionner et faciliter son fonctionnement. Le dernier axe de l’image sociale révèle que l’acquisition d’une voiture personnelle est un moyen d’épanouissement social ; elle relève d’une certaine indépendance, elle facilite la vie, elle crée et renforce des affinités sociales dans le cadre professionnel et relationnel.



  • Le positionnement de sens pratique/ludique : cette position virtuelle est casée entre le ludique et le pratique, ainsi c’est la position des répondants en quête de perfection, de jouissance par le plaisir d’être comblé et satisfait des atouts de sa voiture sous les différents axes traités. La robustesse dans ce volet est synonyme de puissance inégalée du moteur, stabilité et dominance sur la route à l’image du jeune cadre très dynamique, ambitieux et combatif. L’esthétisme est synonyme d’attraction, de démarcation par des formes bizarres et contemporaines. L’endurance est synonyme de longévité, en fait cette belle voiture puissante et attractive doit savoir garder son charme le plus longtemps possible même si son modèle est dépassé par le temps, son style retro peut faire l’affaire et la range dans la catégorie des voitures mythiques indémodables. La technologie est synonyme de sophistication, plus les options et les équipements sont à la pointe de la technologie plus le plaisir de conduire cette voiture y est. Enfin l’image sociale est synonyme de l’ensemble des symboles et significations que peut transmettre cette voiture. Une jeune cadre veut sa voiture à l’image de sa féminité moderne et audacieuse, un jeune cadre veut la sienne à l’image de sa virilité à la fois innée et civilisée.



  •  Le positionnement de sens pratique/critique: les valeurs véhiculées dans cette position émanent des atouts intrinsèques de la voiture entant que telle sans aller chercher dans l’au delà des significations qu’elle peut transmettre. Une voiture personnelle doit être jugée ou évaluée selon sa résistance aux chocs et aux imprévus de la route, ceci sous l’axe de la robustesse. Sous l’axe de l’esthétisme, le critère de jugement est celui du nombre de la série ou du modèle reflétant l’âge, les performances et l’état des pièces et de la carrosserie de cette voiture. L’endurance est calculée par la durée de vie du moteur et la résistance des bougies et aussi par d’autres critères très techniques et détaillés. L’axe technologique ne réside pas dans le fait d’etre équipée d’une technologie de pointe mais plutôt dans le fait que la technologie de base de cette voiture soit perfectionnée et bien maitrisée. L’image sociale n’est pas un axe prépondérant dans ce quadrant car l’image recherchée est celle d’un jeune cadre standard plié aux normes et aux contraintes socioculturelles qui régissent son acte de l’acquisition d’une voiture.

Interprétations, implications marketing et conclusion :

Notre analyse nous a fourni des réponses clés aux questionnements sur la relation qu’entreprend le consommateur avec le produit et sur les contraintes contextuelles et socioculturelles qui régissent cette relation. En effet, l’acquisition d’une voiture personnelle n’est pas un évènement de consommation anodin car il s’inscrit dans un processus de projet de vie émanant d’une production identitaire suivant des trajectoires dans le passé, le présent et le futur et en perpétuel dialogue avec les systèmes discursifs au niveau social, culturel et économique.



Par conséquent, le marketer contemporain avant de s’engager dans une campagne marketing (dans le domaine de l’automobile et ou même dans n’importe quel autre domaine économique) se trouve confronté à assumer trois contrats :

  • Comprendre le consommateur : savoir à qui il a affaire c'est-à-dire non seulement cerner les traits de personnalité de son public cible mais aussi comprendre le dynamisme qui régit la construction de leurs identités et son influence sur leurs modes de consommation. En effet, à partir de notre analyse nous avons constaté que l’expérience de consommation est un élément important dans la construction d’un récit personnel sur son propre vécu chez le consommateur et que certaines marques participent activement dans cette construction, et ce, à travers un processus d’aliénation aux valeurs émises par les discours publicitaires ou à travers une propre attribution de significations soumise à des processus psychologiques tels que les souvenirs, l’attachement à un personnage marquant … la consommation peut être aussi pondérée selon la dichotomie entre le vouloir et le devoir à travers laquelle l’image sociale et notion d’appartenance se manifestent fréquemment durant le parcours d’une vie humaine. Dans un autre volet, nous avons mis le doigt sur les tactiques et les ruses développés par le consommateur actuel pour résister et même détourner la prolifération des styles de consommation que connait nos sociétés contemporaines ; c’est une quête inlassable vers la singularité à travers la création individuelle d’un mode de vie qui défie globalement ou partiellement les modèles et les valeurs régnants dans le système social.



  • Cerner les systèmes discursifs : il s’agit de cerner les tensions qui surgissent entre ces systèmes et le consommateur. Ces conflits se manifestent dans les nouvelles pratiques de consommation selon deux manières. La première consiste à afficher une réticence vis-à-vis des systèmes structurels préétablis par les discours communicationnels. La deuxième, qui est plus coopérative, consiste à se procréer une certaine marge de manœuvre pour pouvoir modeler son processus de consommation sans heurter ni la part objective de l’identité qui se plie aux valeurs émis par les repères socioculturels, ni la part subjective qui émane d’une construction dynamique et négociée. Il est important de signaler aussi que si ces systèmes sont plus au moins statiques et faciles à cerner, les cibles qu’ils visent sont, par contre, mouvantes et dynamiques. A cet égard il vaut mieux que le marketer concentre ses efforts sur la détection des trajectoires tactiques de sa cible que sur la mise en exergue de l’ensemble des contraintes économiques, sociales, culturelles, matérielles … qui marquent les systèmes discursifs contemporains.



  • Modeler la relation entre les deux avec le discours de sa marque : le consommateur est devenu de plus en plus habile dans la lecture des discours publicitaires. Il a, désormais, acquis une aptitude grandissante à les décoder et à même en créer des associations en dehors de leurs cadres purement communicationnel. Cette dernière habilité a été acquise chez le consommateur lors de sa quête inlassable vers la singularité a travers l’altérité ce qui lui permettra, comme nous l’avons signalé maintes fois, de pouvoir créer ses propres trajectoires identitaires en négociant avec les systèmes discursifs établis. A cet égard, le travail du marketer ne consistera plus à saisir les étendus de ces trajectoires identitaires, mais plutôt à se conformer, à son tour, à cette quête de singularité en affirmant une vision singulière relativement stable à travers ses discours de communication. Il est appelé aussi à acquérir l’aptitude de savoir anticiper tout changement dans les systèmes discursifs surtout aux niveaux socioculturels et économiques qui peuvent affecter d’une façon directe ou indirecte le marché de sa marque ce qui lui permettra de proposer des discours communicationnels et des offres plus crédibles et évocateurs mais surtout en phase avec les attentes de son publique cible.

Enfin disons que le marketer d’aujourd’hui doit assimiler que la notion archaïque du consommateur aliéné n’existe plus. Ce dernier s’est transformé en consom-acteur qui participe activement dans l’œuvre marketing, il est même le vecteur catalyseur des nouvelles tentatives de création et d’extensions méthodologiques et pratiques de cette discipline.

Conclusion :

Cette analyse sémiotique nous a permis de mettre en lumière deux révélations dans le processus de consommation associé à l’acte de l’acquisition d’une voiture personnelle, et ce, en mixant l’approche consommateur et l’approche marketing dans un contexte socioculturel en perpétuelle mutation. La première révélation est au niveau de la méthode. En fait ce travail s’articule autour d’une méthodologie révolutionnaire émanant du fait que la sémiotique est la seule science introduite au marketing qui s’abstient de soumettre aux règles et dogmes de ce dernier. Au lieu de considérer les témoignages de nos répondants comme des textes à analyser suivant des méthodes qualitatives et quantitatives en y décelant les variables et les corrélations qui les régissent pour créer un modèle. Nous avons opté à une vision plus holistique en prenant en considération les relations plutôt que les objets et en considérant les récits de nos interviewés comme des discours produisant un sens selon le contexte dans lequel ils s’inscrivent. La deuxième révélation est au niveau de la relation triangulaire qu’on a décelé entre la production de l’identité, le processus de consommation et les facteurs socioculturels. Contrairement au marketing qui focalise sur la production identitaire dans une relation bilatérale entre le processus cognitif chez le consommateur et le produit consommé, notre analyse nous a permis de montrer qu’en fait cette production passe par trois phases la première est purement subjective marquée par des stratégies de démarcation, d’affiliation, d’alignement et de singularité, la deuxième est une opération méta sémiotique en donnant un sens au sens déjà établi d’un objet et la troisième est en fait incarnée dans une optique plus large celle du projet de vie résultant d’une négociation perpétuelle entres des sujets actifs et des systèmes discursifs. Néanmoins nous devons avouer que cette méthode d’analyse présente encore des lacunes car elle ne se base que seulement sur des discours contextualisés se rapportant à un exemple typique de consommation d’un produit bien déterminé et dont les interprétations et les implications n’émanent que d’un point de vue purement sémiotique. Ainsi elle ne peut être généralisée et recommandée dans le cadre d’une stratégie marketing que lorsqu’elle est ajustée par une étude traditionnelle. Cela dit, notre travail s’avère alors comme une simple réponse à l’invitation de mobiliser de nouveaux experts dans des différents domaines tels que la psychologie, la sociologie, l’anthropologie, la linguistique, la sémiotique pour rénover les approches traditionnelles de la discipline Marketing dans le XXIème siècle (Barker, Nancarrow et Spackman 2001).



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  • Venkatesh Alladi and Firat A.Fuat. (1993) “Postmodernity: The Age of Marketing”, International. Journal of Research in Marketing.


ANNEXE

LE GUIDE D’ENTRETIEN

  • Peux-tu me décrire ta voiture?

  • Comment tu l’as choisi ?

  • Comment tu l’as acheté ?

  • Si tu peux la changer, vas-tu opté pour la même marque ? pourquoi ?

  • Depuis quand tu as ta propre voiture ?

  • Quand j’évoque le mot voiture, que veut dire ce mot pour toi ?

  • Es tu influencé par les gens qui jugent à l’apparence ?

  • Actualises-tu souvent tes connaissances dans le domaine de l’automobile ?

  • Comment imagines-tu ta prochaine voiture personnelle ?

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